Bruno LM
by on 18 August, 17:25 pm
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Le 16 février dernier, les députés ont adopté le projet de loi "confortant le respect des principes de la République", en première lecture. Ce texte examiné au Sénat à partir du 30 mars prévoit une période de transition jusqu'à l'année scolaire 2024-2025 avant la fin de l'instruction à domicile.

Article mis à jour le 23/06/21 09:58

Le projet de loi sur les séparatismes adopté par les députés

[Mise à jour du 17 février à 9h58]. Ce 16 février, les députés ont voté en première lecture par 347 voix pour et 151 voix contre (65 abstentions), le projet de loi "confortant le respect des principes de la République". Le texte sera examiné au Sénat le 30 mars 2021 et devrait être adopté avant l'été. Comportant 70 articles, ce projet de loi a été adopté à l'Assemblée Nationale après 80 heures de débats en séance et l'adoption de 144 amendements. Fer de lance d'Emmanuel Macron pour lutter contre le séparatisme, ce texte contient des mesures sur la neutralité du service public, la lutte contre la haine en ligne, le contrôle renforcé des associations, la transparence des cultes et de leur financement, mais aussi la lutte contre les certificats de virginité, la polygamie et les mariages forcés. Autre mesure très discutée, l'encadrement renforcé de l'instruction à la maison.

Un régime plus contraignant pour l'école à la maison

Ce projet de loi a, en effet, pour objectif de faire de l'instruction en famille (IEF) l'exception, la règle étant l'instruction dans les établissements ou écoles publics ou privés. Il prévoit aussi une période de transition jusqu'à l'année scolaire 2024-2025, sous réserve de contrôles, "pour les familles qui pratiquent déjà l'instruction en famille et pour lesquelles ce mode d'instruction ne sert pas à des pratiques séparatistes". Le projet de loi instaure un régime plus contraignant pour l'instruction en famille qui sera soumis à une autorisation préalable de l'Etat, à la place de la simple déclaration actuelle. Des contrôles seront réalisés au cours de l'année 2021-2022 dans les familles pratiquant déjà l'instruction en famille, pour vérifier que "ce mode d'instruction ne sert pas à des pratiques séparatistes" et autoriser sa poursuite pendant les deux années suivantes.

Ecole obligatoire dès 3 ans : à partir de quand ?

Ce projet de loi instaure aussi l'école obligatoire pour tous les enfants dès l'âge de trois ans. "A la rentrée 2021, l'instruction à l'école sera rendue obligatoire pour tous dès 3 ans. L'instruction à domicile sera strictement limitée, notamment aux impératifs de santé" avait annoncé Emmanuel Macron. Est-ce pour autant la fin de l'instruction à la maison ? Le 4 décembre dernier, lors d'une interview accordée au média en ligne Brut, Emmanuel Macron a tenu à rassurer les partisans de l'école à la maison en rappelant que le texte prévoyait des exceptions. "Ce qu'il faut faire, c'est prévoir les bonnes exceptions, qui correspondent à une liberté légitime, qui peuvent continuer à se faire", a expliqué le chef de l'Etat. Le texte renforce par ailleurs l'encadrement des écoles hors contrat en introduisant la notion de "régime de fermeture administrative" en cas de "dérives". Il prévoit aussi d'attribuer "à chaque enfant d'âge scolaire un identifiant national permettant aux autorités académiques de s'assurer qu'aucun enfant n'est privé de son droit à l'instruction ". 

Dans quels cas l'instruction à domicile sera-t-elle autorisée ?

Depuis 10 ans, l'instruction a domicile a été multipliée par trois. A la rentrée 2020, ils étaient 62 000 enfants dans cette situation (0,5% du total des élèves scolarisés), dont 45 000 le sont par choix des parents et non par nécessité. Lors d'une conférence de presse le 9 décembre, le ministre de l'Education nationale a déclaré que "l'instruction à domicile doit être tout à fait exceptionnelle (...) Dans un certain nombre de cas, cela camoufle des structures clandestines salafistes." Récemment, des écoles de ce type ont été démantelées. 50% des enfants qui y étaient scolarisés étaient officiellement scolarisés dans la famille. "C'est pourquoi nous mettrons en place un régime d'autorisation de scolarisation à domicile, et non plus une simple déclaration" a précisé Jean-Michel Blanquer. Il est notamment revenu sur ces exceptions qui "doivent être conformes aux droits de l'enfant". Les parents pourront alors demander une dérogation pour : 

  • l'état de santé de l'enfant, son handicap
  • la pratique d'activité sportive ou artistique intensive
  • l'itinérance de la famille en France,
  • un éloignement géographique

Les parents devront eux aussi apporter une justification : celle d'être en capacité de faire l'instruction à domicile selon l'âge de l'enfant. Ensuite, des contrôles a posteriori pourront être effectués pour s'assurer de la qualité d'enseignement de l'enfant. 

Rappelons que l'âge de l'instruction obligatoire avait déjà été abaissé à trois ans au lieu de six ans en 2019, mais faire école à la maison était tout à fait possible. "Il y a deux ans, nous avions l'instruction obligatoire, l'école maternelle et fondamentale pour tous, mais il restait une possibilité d'instruction à domicile. Désormais, il y a une obligation juridique, avec des sanctions prévues quand on n'envoie pas son enfant à l'école" avait déclaré Jean-Michel Blanquer sur France 2 ce 6 octobre.

Ecoles hors contrat : bientôt un numéro INE pour tous les élèves ?

Depuis trois ans, les établissements privés dits "hors contrat" sont davantage surveillés par l'état, dans un souci de respect des principes de la République. Ils représentent une grande part de la scolarisation des élèves français : 85 000 enfants y sont scolarisés. Ils ne sont pas tous religieux, on remarque qu'ils sont divisés en trois tiers à peu près égaux : établissements avec pédagogie alternative (type Montessori), établissements qui se déclarent laïques et établissements revendiquant une appartenance confessionnelle. Plusieurs ajustements ont été mis en place dans le cadre de la loi "L'école de la confiance" (2019) et de la loi Gatel (2018) pour que tous les enfants français soient éduqués équitablement. 

Hormis l'obligation de respecter un certain nombre de règles pédagogiques, ces établissements hors contrat sont forcés de déclarer tous leurs employés chaque année afin qu'aucun membre ne soit engagé alors qu'il fait l'objet d'une incapacité juridique. Les ressources financières ainsi que tout le bilan comptable de ces établissements privés sont aussi soumis à un regard de l'Etat durant toute leur existence. En plus de ces points qui ont déjà permis d'harmoniser l'enseignement français (qu'il soit public ou privé), le projet de loi souhaite clarifier le "socle minimal de connaissances" requis pour ces lieux d'apprentissage

Un autre point distinguait jusqu'à présent les élèves du public et privé sous contrat et ceux d'écoles hors contrat. Ces derniers ne bénéficiaient pas de leur "identifiant élève" aussi appelé numéro INE. L'objectif est d'en attribuer un à tout élève français, quel que soit son mode de scolarisation. Mais dans la mesure où cette modification exige des ajustements techniques importants, son application pourrait être décalée.

Posted in: News, Education
Topics: #ecole
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